Présentation de mes livres
Pourquoi un génie des mathématiques est-il devenu un ennemi de la science et un précurseur de l’écologie ? Un personnage de roman à la dimension mythique est mort en 2014 dans l’anonymat à Saint-Girons, en Ariège, à l’âge de 86 ans. Depuis vingt-quatre ans, il vivait incognito dans un village pyrénéen. Considéré comme le plus grand mathématicien de son époque et, par certains, de tous les temps, ses convictions pacifistes, antimilitaristes, antinucléaires, néomalthusiennes, anarchistes, détonnaient. Par sa radicalité extrême, il est vu comme un précurseur de la décroissance, de la simplicité volontaire et de l’écologie politique. L’auteur, qui l’a bien connu, décrit et analyse le plus objectivement possible son parcours extraordinaire. Un ouvrage rare sur un personnage énigmatique.
TABLE DES MATIERES
1. DU LOUP AU CHIEN
2. LES CHIENS PENSENT-ILS ET SOUFFRENT-ILS ?
3. PEUT-ON COMPRENDRE SON CHIEN ?
4. POURQUOI AVONS-NOUS CREE LE CHIEN ?
5. POURQUOI AVONS-NOUS CREE TANT DE RACES ?
6. VOTRE CHIEN PARLE-T-IL ?
7. QUE VOIT VOTRE CHIEN ?
8. QU’ENTEND VOTRE CHIEN ?
9. QUE SENT VOTRE CHIEN ?
10. VOTRE CHIEN VOUS AIME-T-IL ?
11. D’OU VIENT L’HYPERSOCIABILITE DU CHIEN ET SON SENS DE L’ENTRAIDE ?
12. VOTRE CHIEN VOUS DOMINE-T-IL ?
13. COMMENT PENSE VOTRE CHIEN ?
14. LE CHIEN EST-IL PLUS INTELLIGENT QUE LE LOUP ?
15. LE CHIEN EST-IL PLUS INTELLIGENT QUE LE CHAT ?
16. LE CHIEN INITIE AU MONDE VIVANT
17. POURQUOI UN PRIMATE ET UN CARNIVORE S’ENTENDENT-ILS SI BIEN ?
POUR EN SAVOIR PLUS
Paru le 22 mai 2022
Tout savoir sur le darwinisme, cette théorie de l’évolution qui a révolutionné notre mode de pensée. Depuis un siècle et demi, la théorie de l’évolution élaborée par Charles Darwin s’est peu à peu imposée dans le monde scientifique. Pourtant, cette explication matérialiste du monde vivant et de l’origine animale de l’homme continue de susciter de vifs débats quant à ses répercussions philosophiques, sociales et civilisationnelles. Aujourd’hui, le concept de compétition est complété par celui de coopération et par la biologie…
Une évocation de mes 2 livres traitant du loup
Mon dernier livre paru en mai 2021 …
Le loup est l’animal sur lequel les hommes ont le plus fantasmé. Pourtant ce n’est pas le prédateur le plus spectaculaire. Alors comment expliquer une telle fascination ? À la lumière des dernières données scientifiques, Pierre Jouventin éclaire des aspects méconnus sur le fonctionnement familial de la meute et démonte nombre d’idées reçues. Loin du mythe du « grand méchant loup », on découvre ainsi qu’il est un animal altruiste, y compris vis-à-vis de l’Homme. L’auteur nous parle aussi du chien, ce loup domestiqué : quels traits de caractère a-t-il gardé de son ancêtre ? Quel est le plus intelligent des deux ? N’est-ce pas finalement sa part de loup qui nous plaît tant dans le chien ? Est également dévoilé le rôle joué par le loup dans l’évolution de notre espèce : c’est lui, domestiqué, qui a permis à Sapiens de tripler le gibier rapporté et donc d’élever plus d’enfants que son concurrent néandertalien. Face à cette entente, il existe des tensions entre l’Homme et le loup : prédateurs tous deux de gros gibiers, nous occupons la même niche écologique… Mais la stratégie de survie du loup est plus écologique quand la nôtre semble ne plus avoir d’avenir : lorsque le gibier se raréfie, il stoppe ses naissances ou migre pour survivre. Ce livre peut être lu à la manière d’une fable, comme l’entendait Jean de la Fontaine : « Je me sers d’animaux qui instruisent les hommes. »
Interview sur ARTE à l’émission « 28 minutes » à l’occasion de la sortie de mon livre
Bien des débats agitent les amateurs de chiens sur la parenté avec le loup et sur les conséquences que cela entraîne pour l’éducation canine.
Ce livre souhaite clarifier cette question en montrant, avec les données les plus récentes de la science, comment la parenté avec l’ancêtre influe sur la relation que nous pouvons avoir avec son descendant. Fruit de la rencontre entre un chercheur en comportement animal, ayant eu l’occasion, rare et unique, d’élever une louve dans son appartement, et un éducateur canin basant son travail sur les données de l’éthologie (science du comportement animal), il est construit en deux parties complémentaires :
- La première partie, théorique écrite par Pierre Jouventin, mêle histoire et science. Elle permet de comprendre où se trouve la part du loup dans le chien, ce qui a poussé l’homme à le domestiquer et en quoi, par ce processus, le chien diffère néanmoins aujourd’hui de son ancêtre.
- La seconde partie, pratique, écrite par Guillaume Richard, apprend à construire sa relation avec son animal et à « penser chien » en s’appuyant sur la connaissance de ses origines et de sa biologie. De nombreux exercices et jeux permettront au lecteur de matérialiser et cimenter le lien avec son compagnon.
Cet ouvrage est issu d’une confrontation de deux points de vue, celui de Serge Latouche, économiste, et celui de Pierre Jouventin, éthologue. Animé par le philosophe Thierry Paquot, ce débat prend en compte les dernières recherches en sciences de la vie et en sciences de l’homme. Si dans certains domaines les opinions s’opposent, la convergence est profonde tant sur le constat de la destruction de l’environnement naturel que sur les mesures à prendre pour y remédier, qui toutes remettent en cause le fonctionnement de nos sociétés. L’humanité scie, en quelque sorte, la branche sur laquelle elle est assise…
Les auteurs évoquent les leçons que nous pourrions tirer des modèles d’organisation des sociétés primitives ou des communautés animales. Ils font également référence aux penseurs qui les ont précédés et ont développé des perspectives prémonitoires qui interpellaient déjà notre avenir.
Le propos de ces regards croisés sur l’effondrement en cours résonne comme une alerte, dénonçant l’ampleur des dégâts annoncés et l’étroitesse de la voie alternative ; il nous encourage à penser l’après, c’est-à-dire à réagir sans attendre…
Serge Latouche est professeur émérite à la faculté de droit, économie et gestion Jean Monnet de l’université Paris-Sud. Il a développé une théorie critique envers l’orthodoxie économique. Il est un des penseurs les plus connus de la Décroissance, auteur de nombreux ouvrages.
L’homme cet animal raté-Pourquoi détruisons-nous la planète? (réédition complétée)
Si l’homme n’était pas le sommet de l’évolution, contrairement à ce qu’il se raconte depuis 2 000 ans ? Il n’a pas su prévoir que l’accroissement de la population se ferait plus vite que celui des ressources alimentaires et n’a pas compris qu’il ne pouvait y avoir un développement infini dans un monde fini.
Et si ce dont il est si fier et qui fait, paraît-il, sa supériorité sur l’animal – la raison, la culture, le langage et la morale – n’était pas une supériorité, mais une entrave… Si tous ces dons avaient été mal maîtrisés, détournés ?
Pourquoi, avec son intelligence, n’a-t-il pas su éviter la surpopulation et l’épuisement des ressources naturelles alors que les animaux se régulent depuis toujours ?
Pourquoi, malgré sa technologie et son industrie, se trouve-t-il de plus en plus cerné par les pollutions ? Son orgueil lui a-t-il fait ignorer que les lois de la nature s’appliquent aussi à l’espèce humaine ?
Pourquoi Homo sapiens, autrement dit celui qui sait, celui qui a découvert l’agriculture, l’élevage et la civilisation, s’est-il fait piéger par le changement climatique et les conflits politico-religieux qui aboutissent aujourd’hui à des guerres et aux déplacements des populations ?
Cette enquête sur notre espèce n’est pas idéologique, mais naturaliste. Elle s’appuie sur les découvertes récentes de la science, particulièrement en écologie, éthologie, évolution génétique et préhistoire. L’homme est-il devenu un inadapté de la nature, un animal raté ?
Une réédition en livre de poche enrichie et mise à jour
Pourquoi les manchots empereurs kidnappent-ils les poussins ? Pourquoi les perroquets parlent-ils et pas les singes ? Pourquoi les mandrills sont-ils si colorés ? Ce livre répond à ces questions et à bien d’autres.
À travers anecdotes et souvenirs de ses recherches menées sur tous les continents, de l’Afrique à l’Antarctique, l’auteur invite le lecteur à un voyage dans l’écologie, l’évolution, le comportement animal, la conservation des espèces animales.
Il vous fera aussi part de ses humeurs concernant l’exploitation de notre environnement et le mépris envers nos frères dits inférieurs. Observés de plus près, les animaux sont-ils «bêtes» et Homo sapiens est-il vraiment sage? Pierre Jouventin nous ouvre les yeux sur ce que les animaux nous apprennent de nous-mêmes.
L’auteur : Docteur d’État en écoéthologie (université de Montpellier), Pierre Jouventin a été Directeur de recherche en éthologie au Centre national de la recherche scientifique & Directeur de laboratoire d’écologie au CNRS.
Collection : Alpha : Prix : 9,90 €
Depuis quelque temps, Darwin fait l’actualité… les ouvrages se succèdent. Jean-Claude Ameisen en a fait une série radiophonique, Sur les épaules de Darwin, qui obtient une large écoute sur France Inter et fait l’objet de deux livres. Pascal Picq, dans son ouvrage De Darwin à Lévi-Strauss, nous donne une analyse subtile… L’œuvre de l’auteur de L’Origine des espèces est explorée, voire exploitée. Pourtant, peu de biographes ou d’exégètes se sont intéressés à l’aspect sans doute le plus révolutionnaire de la pensée de Darwin qui réconcilie les sciences naturelles et les sciences sociales. Cette explication matérialiste du monde vivant et de notre origine animale, sûrement trop dérangeante, a été laissée de côté. C’est en fin connaisseur de cette œuvre monumentale que Pierre Jouventin, la replaçant dans son contexte historique et exploitant l’ensemble de ses écrits, nous fait découvrir un Darwin méconnu. Ses découvertes éthologiques font de lui un penseur éthique majeur qui fonde une réflexion écologique indispensable à la société moderne. La Face cachée de Darwin est un livre fondamental qui apporte un nouvel élan à notre pensée sur l’homme en le resituant dans la nature.
À l’heure où les problèmes écologiques nous interpellent par des catastrophes de plus en plus fréquentes, cet ouvrage est incontournable pour comprendre comment s’engage l’avenir de l’homme dans un monde qu’il a grandement contribué à déstabiliser.
Commentaires des lecteurs :
Le chat et le chien sont-ils des « ados » éternels ? Sont-ils altruistes ? Comment communiquent-ils entre eux et avec les humains ? Quand et comment le loup a-t-il été domestiqué pour donner le chien ? Etc. En répondant à ces questions et à bien d’autres, ce livre retrace l’aventure commune d’un trio d’anciens chasseurs – homme compris – marqués par ce passé de prédateur. Rempli d’anecdotes vécues sur la relation intime entre l’Homme, le chat et le chien, ce livre nous apprend à mieux comprendre nos animaux de compagnie… et à mieux nous connaître. Au fil des pages, l’auteur se fait aussi l’avocat des « bêtes » qui ne peuvent parler, mais manifestent des dons que l’on croyait réservés à notre seule espèce, voire développent des capacités supérieures aux nôtres.
Le point de vue critique d’Hélène Brissaud :
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- Livre d’une incroyable richesse. Au fil des pages, l’éthologue décode les animaux, mais aussi ses semblables. Livre d’une profondeur qui permet une immersion totale, donnant ainsi une claque aux idées reçues comme pour le loup, l’ancêtre du chien indispensable à l’équilibre de la nature dans les écosystèmes.Pour comprendre le langage des animaux, il faut surtout apprendre à sortir de son monde humain pour entrer dans le leur. Les animaux éprouvent comme nous des sentiments et des émotions, ont le sens inné de la justice, des comportements altruistes. Beaucoup de chiens ont conservé le sens de l’entraide du loup. Nous sommes de véritables parvenus de la prédation et par nos actions nous contribuons à l’érosion de la biodiversité dans le monde, aux déséquilibres écologiques, à la disparition d’espèces, et aussi peut-être à d’autres espèces humaines. En matière de droits des animaux, la France a un demi-siècle de retard par rapport aux anglo-saxons. Nous sommes le pays européen qui autorise à chasser le plus d’espèces durant le plus de jours dans l’année. Nous nous sommes véritablement fourvoyés, éloignés de la nature et de notre essence même. Nous sommes les prédateurs les plus opportunistes. Il n’y a pas de bon ou mauvais, ils font partie d’un tout, écosystème où chacun a sa place. La nature est très bien faite. Il nous faut donc apprendre à éviter de catégoriser les animaux sauvages en nuisible ou utile et à les respecter.Ils sont de véritables « panseurs » ! L’opinion se rend compte que la défense des animaux rejoint le combat pour l’avenir de la planète. L’amour de l’animal transcende les barrières culturelles et intellectuelles. Ce livre est un véritable hymne à la vie et au respect du vivant quel qu’il soit !
CONFESSION D’UN ELEVEUR DE LOUP EN APPARTEMENT
par Pierre Jouventin
Je ne suis ni le premier, ni le dernier que les aléas de la vie ont amené à renier ses convictions. Pendant un demi-siècle, comme Directeur de Recherche au Centre National de la Recherche Scientifique, j’ai arpenté les grands espaces vierges, de la forêt équatoriale à l’Antarctique et les îles environnantes (où j’ai séjourné près de neuf années). J’y étudiais les oiseaux et mammifères en liberté car j’étais spécialiste de l’écologie et de l’éthologie des animaux sauvages. La sélection naturelle a modelé fortement les mœurs d’espèces étonnantes comme le manchot empereur, le grand albatros, l’éléphant de mer ou le mandrill. Des adaptations inimaginables sont apparues au cours de l’évolution qui permettent à ces animaux emblématiques de survivre dans ces milieux extrêmes. C’est donc seulement sur le terrain que l’on peut comprendre le pourquoi de ces comportements extraordinaires que j’observais.
Outre l’absence du biais de la captivité, idéal pour une étude scientifique objective, j’évitais de priver l’animal de liberté et de le faire vivre dans des conditions dégradantes ce qui soulageait ma conscience. J’ai en effet toujours été soucieux d’éviter les souffrances inutiles et j’ai manqué devoir arrêter mes études de biologie pour avoir refusé de disséquer des lapins vivants lors des travaux pratiques de physiologie animale. Il a fallu que j’obtienne une équivalence de diplômes pour que ma carrière de chercheur en éthologie ne s’arrête pas là. Ayant été recruté quinze jours avant le départ pour un séjour de quatorze mois en Terre Adélie, j’ai aussi refusé d’effectuer les expériences de physiologie qui étaient prévues sur les manchots empereurs et j’ai pu réaliser un programme d’enregistrement de leurs chants car il était trop tard pour me remplacer. Entre mes longues missions, j’analysais mes données à la Faculté des Sciences de Montpellier et publiais les résultats de mes recherches. Parfois, le Directeur du zoo municipal me demandait conseil pour mieux élever les animaux qu’il montrait au public. C’est ainsi qu’il m’apprit qu’une campagne critique sur les conditions d’élevage des loups en zoo lui avait enlevé toute possibilité de céder à d’autres établissements les jeunes de la portée qui venait de naître et que, manquant de place, il allait devoir les sacrifier.
Je lui avais confié que ma compagne était une inconditionnelle de cet animal mythique, allant dans son enfance jusqu’à pleurer la mort du grand méchant loup lorsque les chasseurs le tuait à la fin du ‘Petit chaperon rouge’ ! Son rêve avait toujours été d’en élever un, ce qu’elle croyait utopique mais que je savais possible par mon métier. On sait que l’amour et la jeunesse rendent aveugle et cette adoption chimérique devenait subitement réalisable suite à la proposition du Directeur…
Les contraintes et les responsabilités de l’adoption d’un animal redoutable ne faisaient pas peur à un jeune couple avec enfant. Pourtant nous avions la malchance d’habiter dans moins de 100 m2 en plein centre-ville au deuxième étage… Notre maison avec un enclos clôturé était en construction et nous pensions naïvement déménager dans quelques mois. Nous avons donc accepté d’adopter une petite louve qui n’avait pas encore ouvert les yeux : ma femme et mon fils étaient comblés !
Or, pour diverses raisons, le retard fut tel que nous avons passé près de cinq années à cohabiter avec ce fauve dans un appartement, ce qui est considéré comme impossible par les spécialistes du loup. Dans cette promiscuité forcée, nous sommes parvenus à créer un climat social harmonieux, alors qu’il s’agissait d’une famille recomposée où l’un des membres était d’une autre espèce et particulièrement dangereuse. C’est ainsi que, sans l’avoir prévu et contre mes principes éthiques, nous nous sommes retrouvés dans une intimité depuis longtemps inconnue entre l’homme et le loup.
Cela se passait il y a plus de 30 ans et c’est cette histoire que je raconte avec beaucoup d’anecdotes dans le livre que vient de publier Flammarion : ‘Kamala, une louve dans ma famille’. Pourquoi avoir attendu si longtemps ? D’une part, j’étais très occupé par mon travail, ayant publié plusieurs livres et 230 articles scientifiques dans des revues internationales, ayant découvert cinq espèces d’oiseaux nouvelles pour la science, ayant dirigé pendant près de quinze ans un laboratoire du CNRS et pendant dix ans un programme interdisciplinaire au CNRS, etc… D’autre part et surtout, j’avais mauvaise conscience d’avoir fait exactement le contraire de ce que je prônais et je ne voulais pas donner le mauvais exemple en incitant d’autres à faire de même. Or, depuis vingt ans, la loi française interdit d’élever chez soi un animal sauvage et, depuis quelques années, étant retraité, je dispose de temps pour réfléchir et rédiger. Bien que polémique par essence, ce livre, répond aussi à la demande que m’avait faite en son temps mon directeur de thèse, fasciné par cette aventure incroyable, mais qui n’était pas arrivé en son temps à me convaincre de descendre dans la fosse aux lions !
Il m’a en effet paru nécessaire de rendre publics nos observations fortuites qui ont seulement été possibles par cette vie de meute car elles sont impossibles à découvrir dans la nature ou même en captivité ‘normale’. Tous les spécialistes des loups disposent d’un enclos et donc ils ne peuvent atteindre une si grande proximité avec cette espèce hautement sociale qui s’est révélée pour nous encore plus fascinante que ce que l’on en sait aujourd’hui. C’est donc une erreur de jeunesse qui m’a fait découvrir des comportements réservés aux membres de sa famille puisque Kamala, n’ayant jamais connu de congénère, nous assimilait à ce qui aurait été dans la nature ses camarades de meute. C’est un hasard qui l’a mise en présence d’un chercheur spécialiste du comportement des animaux sauvages, ce qui a permis d’interpréter les comportements les plus surprenants. Cet attachement magique d’une espèce pour une autre est en effet bien connu en éthologie et il a été nommé par Konrad LORENZ ‘l’imprégnation’ : si vous élevez un jeune d’une espèce très sociable comme l’oie ou le loup à l’écart de ses congénères, il vous considère en grandissant comme un proche et vous imite allant jusqu’à répéter vos phrases dans le cas des oiseaux-parleurs comme les perroquets ou les mainates.
Certaines attitudes de la louve demeuraient énigmatiques, même pour quelqu’un dont c’est le métier de comprendre les animaux. Nous avons d’abord été intrigués par des réactions étranges de Kamala. Elle nous tirait du bout des dents loin des balcons, piscines, fenêtres, baignoires. Nous avons compris après plusieurs mois d’observation qu’elle nous écartait des endroits qu’elle considérait comme dangereux. Cette hypothèse hardie a été confirmée quand, allant nous baigner en rivière, elle s’est jetée à l’eau à plusieurs reprises pour nous ramener à la rive en nous saisissant le bras délicatement mais fermement. Ces observations et leur interprétation ne sont pas seulement des hypothèses et vous pourrez vous-même en convenir : j’ai pris des photographies et des films à l’époque que vous pouvez voir sur le site internet que j’ai créé pour prouver mes dires et compléter mon livre http://kamala-louve.fr/
Trente années plus tard, ces comportements n’ont toujours pas été observés par les spécialistes du loup et ils sont donc toujours inconnus de la science. Il m’a paru donc utile de le faire savoir, même de le publier en France et aux USA car cette espèce, en pleine reconquête en Amérique du nord et en Eurasie, va être persécutée et elle aura besoin d’être réhabilitée pour que l’on agisse avec mesure face à ce mal aimé, ce concurrent au plus haut niveau de la sociabilité. Ces comportements d’entraide entre les membres du groupe démontrent que, loin d’être l’ennemi héréditaire de l’homme et la bête malfaisante que l’on dit, le loup est une espèce encore plus remarquable que ce que l’on savait. Il partage avec nous ce qui a longtemps été considéré comme le propre de l’homme, l’altruisme.
Bien plus que le chimpanzé si proche génétiquement de nous mais si éloigné par son écologie, je soutiens dans ce livre la thèse que le loup est notre équivalent écologique du fait de la convergence de nos fonctions de super-prédateurs dans la nature jusqu’à récemment. La paléoanthropologie moderne[2] a montré que l’homme a été un chasseur-cueilleur pendant 95% de son existence (10.000 ans d’élevage-agriculture contre 200.000 d’Homo sapiens) et que son comportement actuel en reste héritier. J’ajoute à ce constat qui change notre vision de l’histoire de l’humanité que les comportements sociaux du loup et de l’homme se ressemblent parce qu’ils ont été tous deux modelés par l’adaptation à un même mode de vie de chasseur en meute pendant des centaines de milliers d’années. Cette convergence psychologique entre deux espèces de super-prédateurs explique ce mélange détonnant de combativité et de solidarité qui trouble les amis du loup comme ceux de l’homme… La coordination pour la traque, qui a été notre spécialité commune jusqu’à récemment, a exigé pour chaque espèce l’aptitude à la course de fond, une forte agressivité, une communication subtile et surtout de la coopération ce qui fait de nous un primate unique qui a changé de mode de vie. Dans mon livre et avec plus de détails, j’en conclus que le loup est psychologiquement plus proche de l’homme que le chimpanzé dont la biologie moléculaire a prouvé qu’il n’avait qu’un peu plus de 1% de différence génétique avec nous. Ce nouvel élément du puzzle permet de mieux comprendre la nature humaine impossible à décrypter dans le mode de vie moderne si éloigné de celui auquel nous étions adaptés depuis longtemps et qui se trouve toujours dans nos gènes[3].
Ainsi mes observations fortuites et moralement discutables (bien que nous ayons sauvé Kamala de l’euthanasie) ont permis de découvrir que le loup est altruiste comme l’homme. Peut-être même l’est-il plus : sa solidarité est instinctive alors qu’elle comporte chez nous une part plus grande de culturel, et c’est ce qui la rend fragile, comme nous pouvons l’observer tous les jours autour de nous… Prenons modèle sur le loup !
Paru dans ‘La Gazette des Grands Prédateurs’, N°45, 2012, www.ferus.fr
Dans un monde contraint de retrouver une cohabitation positive avec cette espèce étonnante, ce livre est un trésor d’observations et d’expériences vécues, narrées avec humilité et intelligence.
Comme lors du témoignage de Jean-Michel Bertrand, ce livre rompt avec la niaiserie Disney, car il pointe les failles de l’espèce humaine dans son rapport au monde dit « sauvage », et nous invite à la circonspection, au respect de l’altérité, à reconnaître nos rêves les plus anciens…
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